Engagement JPIC des Religieuses du Sacré-Cœur - Marie-Paule Préat
Dans un Intervention Assemblée provinciale de juillet 2022, Marie-Paule Préat rscj parle de l'Engagement JPIC des Religieuses du Sacré-Cœur :
Le sigle JPIC désigne : Justice, Paix, Intégrité de la Création.
D’où vient ce sigle ? De l’expression « le royaume de justice et de paix » qui apparaît dans la Bible comme la concrétisation du projet d’amour de Dieu pour l’humanité. Il y a une 50ne d’années, la dimension de l’« intégrité de la Création » a été ajoutée à cause de la prise de conscience que la sauvegarde de la création fait aussi partie intégrante de ce projet de Dieu.
Pour les religieuses du Sacré-Cœur, il y a eu une rencontre internationale très importante à ce sujet et nous sentons de plus en plus clairement que cette préoccupation pour la « Maison commune », pour l’avenir de l’humanité fait partie de notre charisme et de notre mission. Cette rencontre a eu lieu en novembre 2019 aux Philippines. Chaque province était représentée par une rscj. Nous avons partagé beaucoup de réalités de souffrance et de violence à travers le monde, et pourtant ce fut une rencontre joyeuse qui nous a communiqué de l’énergie parce qu’elle était animée par l’espérance. Le titre du document qui a été publié et qui résume les prises de conscience et les engagements est évocateur de cette expérience : Être des artisans d’espérance dans notre monde béni et brisé.
Voici une présentation très synthétique des 4 points qui balisent notre engagement aujourd’hui :
1. Se laver mutuellement les pieds
En partageant des expériences dans nos missions et le partage de la vie de nos peuples, nous sommes arrivées à la conclusion suivante : à la racine de toutes les injustices, les violences et les guerres, il y a l’abus de pouvoir. Que ce soit au plan individuel, au niveau social ou international, le désir de dominer l’autre et de l’utiliser à son profit pourrit les relations. La tentation d’abuser de notre pouvoir nous habite tous. Nous sommes aussi complices de systèmes injustes. Aussi nous avons senti qu’il nous fallait travailler cela : passer d’une position dominante à une position « basse », la position de Jésus quand il se met à genoux pour laver les pieds de ses disciples. A la suite de ce geste, il les a invités à faire de même. Cet appel a retenti fortement pour nous et pour la famille du Sacré-Cœur, une invitation à prendre conscience de nos abus de pouvoir et à grandir en humilité.
2. Transformer et être transformé
Pour participer à la transition actuelle, le premier pas est de commencer par se laisser transformer. Un combat volontariste et militant court le risque de s’essouffler. La situation est telle que le sentiment d’impuissance peut paralyser les énergies. Il est apparu qu’il était plus fécond de faire confiance à la vie, en cette intelligence collective qui émerge un peu partout au cœur des situations critiques. Dans la foi, nous y voyons aussi l’Esprit Saint à l’œuvre dans nos existences et dans la vie du monde. Il nous transforme et agit dans l’humanité aujourd’hui. Telles sont les sources d’une espérance active et créative. Nous sommes appelés à agit localement, tout en gardant cette vision large et globale d’une création en travail d’enfantement.
3. Prendre soin de la « maison commune »
Sous cette expression, l’encyclique Laudato Si du Pape François regroupe la triple dimension du bien commun. Tout est lié : sans justice, la paix est impossible. Nous sommes de plus en plus conscients que la crise écologique est aussi enracinée dans l’injustice et que l’avenir de la planète menace la survie de l’humanité. Tout se tient. Nous aussi nous nous plaçons dans cette recherche d’écologie intégrale et de changements systémiques. Nous voulons nous relier à tous ceux et celles qui explorent des voies nouvelles.
4. Accueillir les personnes qui se déplacent
Une manière concrète de vivre la transition aujourd’hui est de marcher tout spécialement avec ceux qui se déplacent. Cela signifie non seulement les accueillir et leur donner des possibilités de logement, d’éducation, de travail, mais aussi d’apprécier les richesses culturelles et humaines qu’ils apportent et de chercher avec eux comment construire un monde plus vivable pour tous. Nous pouvons changer notre regard sur eux et les voir comme des pionniers dans la recherche d’une humanité nouvelle.
Le soin des relations est à la racine de notre tradition spirituelle et apostolique. Nous grandissons aujourd’hui dans la prise de conscience de l’urgence de prendre soin des inter-relations, c’est-à-dire de tout ce qui concerne notre « vivre ensemble », le bien commun, l’avenir de notre planète et de toute la création. Retisser les liens de la paix et restaurer la société de son temps était déjà le souci de sainte Madeleine-Sophie ! Nous n’inventons rien. Au sortir de la révolution de 1789, elle était préoccupée par la situation sociale et religieuse. L’œuvre de l’éducation était pour elle un moyen pour collaborer à la reconstruction du lien social.
Quelle chance nous avons de vivre ce moment de transition planétaire. Il y a des risques énormes, mais quel beau défi d’être, parmi tant d’autres personnes et associations, des « artisans d’espérance », des tisseuses de liens, des passeurs de lumière… Notre espérance, c’est que nous vivons un travail d’enfantement : il y a de la douleur, et une vie nouvelle qui cherche à naître.
Marie-Paule Préat rscj